Avec sa 3ème réalisation Sean Penn montre qu'il est un cinéaste de l'obsession: comme dans ses précédents films, un homme, profondément marqué par une tragédie personnelle ou qu'il a fait sienne, est entraîné dans une dérive morbide qui bouleverse sa vie. Cette fois, un flic sur le point de partir à la retraite, campé par un Jack Nicholson qu'on n'avait pas vu aussi sobre depuis longtemps, est rattrapé de justesse par une affaire de rapt d'enfant: plutôt que de partir pêcher au Mexique, Jerry fait le serment aux parents de la victime de retrouver le coupable coûte que coûte. Dès lors cet inspecteur s'enferme dans une spirale obsessionnelle le menant aux frontières de la folie. Sean Penn observe son protagoniste aller jusqu'à s'inventer une nouvelle vie pour mettre la main sur le meurtrier. Là encore, sans effets, le cinéaste installe une tension quasi palpable autour de Jerry et de sa compagne. Et pourtant, l'enquête du policier, qui prend peu à peu l'allure d'une quête métaphysique, ne cesse de nous interroger: et s'il se trompait?s'il avait fantasmé un monstre bourreau d'enfants pour satisfaire un pharisaïsme démesuré? A la fin du film, alors que Penn a dévoilé au spectateur le fin mot de l'histoire, Nicholson, captif de son propre engagement moral, bascule vers un territoire qui évoque le Dino Buzzati du Désert des Tartares.
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