Attention expérience unique. Difficile de se réveiller indemne au lendemain de la découverte de cet OVNI du cinéma français : A-t-on bien vu ce que l’on a cru voir ? A-t-on rêvé ? Nous a-t-on drogué ? Ni les œuvres les plus illustres, ni les ratages les plus affligeants n’ont la faculté de produire une telle sensation.
Qui parmi nous aurait été susceptible de croire qu’on puisse, qu’on ose, qu’on envisage même, de mettre en image la « Mort qui programme sur son grand ordinateur » chantée par Lalanne ? Qui, parmi ceux qui n’ont jamais entendu parler de ce Passage, aurait soupçonné que cette formule soit autre chose qu’un pétard mouillé métaphorique ?
Et ce n’est pas à un seul Lalanne que nous avons droit, mais à la triplette. Francis à la bande originale, Jean-Félix au scénario et René Manzor à la camera. Que du bonheur !
A mi-chemin entre le conte pour enfants et le bad-trip LSD, nos frères Dalton des zarzélettres accumulent de façon totalement désinhibée tous les clichés imaginables. Le déluge sanguinolent, la faucheuse noire ou l’aveuglante lueur post-mortem, tout y passe dans cette histoire surréaliste et nunuche parsemée de dessin animé en « noir et blanc et sang ». On est tour à tour consterné, hilare, surpris et parfois fasciné par le résultat. Les images peuvent même trahir un certain talent d’esthète, paradoxalement au cours des scènes les plus saugrenues. Difficile alors de juger objectivement l’interprétation. Delon s’en tire relativement bien jusqu’à son face-off avec la mort où l’on ressent chez lui une certaine incrédulité, tandis que Christine Boisson reste pour une fois habillée dans plus de 75% de ses prises.
A l’issue du générique, heureux celui qui saura s’il a assisté au film le plus grotesque de l’histoire du cinéma, à une mauvaise blague, au témoignage d’amertume d’un quidam récemment d échu d’autorité parental ou à un chef d’œuvre de naïveté. Dès lors, on ne peut que recommander à tous de voir cette « chose » une fois dans sa vie.
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