Cinéaste à part, alcoolo invétéré, Sam Peckinpah signe en 1974 un film très personnel en ce "Apportez moi la tête d'Alfredo Garcia". Les aventures de ce pianiste s'improvisant chasseur de primes et qui part à la recherche de cet Alfredo Garcia sont l'occasion pour le réalisateur de développer des thèmes communs à bon nombre de ses films. D'abord l'itinéraire d'un loser, tant il est vrai que "personne ne gagne" dans les films de Peckinpah, tant il est vrai que bons ou méchants se confondent habilement : le personnage de Bennie est l'exemple même de l'homme qui subit plus qu'il ne dirige son destin. Du jour au lendemain il voit l'occasion de faire fortune (sa maîtresse sait où se trouve Alfredo) mais assez cruellement le réalisateur ne peut se résoudre à en faire un winner. Bennie, qu'il le veuille ou non, devra se résoudre à accepter sa punition, celle-ci étant le prix à payer pour trouver cette foutue tête. Car le maître mot du film est la fatalité : fatalité des situations, fatalité des personnages qui contraste cependant avec les quelques scènes d'accalmie du film. Peckinpah ne repose pas son spectateur et dès qu'il s'autorise une scène de tendresse ou "tranquille", celle-ci est contre-balancée par la scène suivante toujours noire et pessimiste : Bennie déclare à sa maîtresse qu'il l'aime et qu'il veut l'épouser quand peu de temps après celle-ci est menacée de viol ; Bennie trouve l'endroit où se trouve Alfredo Garcia mais se retrouve enterré vivant la scène suivante etc...
Ajoutez à celà la technique du grand Maître avec ses plans en slow-motion, ses dialogues et ses personnages mysogines et vous obtenez un Peckinpah pur jus, qui transpire bien la sueur et le désespoir.
Bennie trouvera Alfredo, lui tranchera la tête, portera cette tête à qui de droit, mais au bout du chemin, il y a comme une quête désespérée pour une hypothétique rédemption; hypothétique car comme vous le savez bien, aucun mort n'est inutile chez Peckinpah.
|