Un des derniers films de Gabin en France avant l'éclatement de la seconde guerre mondiale permet à cet acteur de légende de nous montrer encore toute l'étendue de son talent.
Le film, servi par des dialogues de Jacques Prévert constitue l'une des pièces maîtresse de ce que l'on appellera le réalisme poétique au cinéma. Marcel Carné continue ce qu'il avait initié dans le Quai des brumes, à savoir filmer des amours contrariées sur fond de tissu social difficile. Mais le Jour se lève est plutôt construit comme une tragédie (unité de temps, de lieu et d'action) et utilise de façon très intelligente la technique du flashback pour expliquer au spectateur le cheminement du héros, acculé dans une chambre au cinquième étage d'un immeuble, cerné par la police.
La construction dramatique du film est remarquable à double titre : en effet, tant dans les scènes de flashback que dans les scènes de temps présent, la narration progresse toujours de façon dramatique. L'intérêt du spectateur est toujours mis en éveil par la caméra de Carné qui s'évertue à toujours donner plus d'intensité et de justesse à sa narration. Ce qui nous vaut peu avant le final une scène magistrale de Gabin en train d'hurler à sa fenêtre, au bord des larmes, héros médiocre d'une histoire qui au départ ne devait pas l'être.
Gabin nous fait une interprétation mémorable, mais celle de Jules Berry est encore un cran au-dessus : ce merveilleux comédien français nous sert une composition d'un naturel et d'une légèreté peu commune. On devine déjà en lui le futur Diable des Visiteurs du soir. Quelques mots d'Arletty qui est également lumineuse et affirme une belle présence à l'écran. Enfin, le film ne serait pas grand chose sans les décors magnifiquement étudiés d'Alexandre Trauner qui participent tout autant à la dramaturgie du film (notamment dans la hauteur de l'immeuble du film).
Un vrai chef d'oeuvre du cinéma français qui inspirera de nombreux films par la suite notamment du côté transalpin et son mouvement néo-réaliste.
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