Le malheureux qui aura eu la riche idée d'offrir à son petit neveu ce DVD pour Noël parce qu'il était moins cher qu'un Disney, risque d'avoir provoqué une anicroche dans la cohésion familiale. Car si la Honte de la jungle est un film d'animation, ce n'est sûrement pas un dessin animé pour enfants. Imaginez un Tarzan mis à la porte de chez lui, en raison de ses piètres performances sexuelles, par une Jane, nymphomane et poison, qui préfère se consoler au lit avec le singe. Ou encore, imaginez une armée de pénis à calotte wehrmacht prête à conquérir le monde grâce à son foutre sulfurique.
Néanmoins, la Honte de la jungle n'est pas un vulgaire porno animé à ranger aux cotés des œuvres de Brigitte Lahaie. En effet, le film se révèle sur certains aspects très créatifs: intrusion de vraies photos dans le D-A, interpellation du spectateur, gags visuels très loufoques... Il peut même, par moment, nous rappeler l'esprit du Monty Python: le déroulant d'introduction qui va trop vite pour le narrateur, les anachronismes omniprésents, la potiche qui se plaint d'avoir couché avec des dizaines de producteurs pour n'apparaître que cinq minutes dans le film... mais surtout grâce à ses illustrations assez voisines de celles de Terry Gilliam (la grotte infernale ou l'Afrique en forme de femme nue par exemple). D'autre part, ce D-A peut même se voir interprété comme une pugnace satire d'une société basée sur la domination et sur le sexe; la machine à transformer les bébés en phallus militaires en est le plus bel exemple. En outre, Picha en profite pour allumer Hergé en nous montrant un Tintin évangélisateur qui éduque les petits nègres à grands coups de crucifix sur la tronche.
Plus proche d'Hara-kiri que de Walt Disney mais cependant plus proche d'Edika que de Manara, la Honte de la jungle, appelé également Tarzoon lors de sa sortie épurée outre-Atlantique, reste un D-A audacieux qui ravira les moins maniérés d'entre vous.
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