Les épées du septième art ont pour habitude de nous présenter ce film de Tourneur comme un must de l'humour noir; ceci prouve une fois de plus que l'appréciation de nos experts du grand écran en matière de farce demeure qualitativement équivalente à celle, bien improbable, des Essais de Montaigne émanant des brillantes délibérations cérébrales du lofteur standard. Ne vous attendez pas à du Oscar Wilde, ni même à du Polanski, The Comedy of terrors n'est rien d'autre qu'une production dans la grande tradition de la Metro, c'est à dire lourde, sans saveur et fastidieuse:
Primo, l'interprétation de nos superstars hollywoodiennes rend vite le film indigeste. Le duo Vincent Price / Peter Lorre est absolument insupportable tant le premier grimace et cabotine à outrance tandis que le personnage d'amorphe maladroit du second révèle un pouvoir d'harassement à coté duquel le plus puissant neuroleptique ferait figure d'amphétamine. Seul Boris Karloff en vieillard décrépit et Joyce Jameson, qui incarne une Florence Foster-Jenkins de funérailles, parviennent à susciter quelques maigres sourires au milieu de toute cette mélasse.
Secundo, les effets comiques auxquels Tourneur a recours auraient pu permettre l'élaboration d'une encyclopédie définitive du gag éculé si, depuis, Jim Carrey et Leslie Nielsen n'avaient pas repoussé les limites de la déficience créative dans le domaine. Croche-pieds, rebondissements prévisibles et « répétition d'un comique de répétition répété », il ne manque en effet plus qu'une bataille de tartes à la crème pour rendre cette comédie véritablement effroyable. Au menu: d'interminables expéditions meurtrières, truffées de pitreries si médiocres qu'elles en deviennent gênantes, en hors d'oeuvre (l'absence du tiret est ici volontaire). Un personnage, fou de Macbeth increvable, semblant avoir été mis au point un soir de murge, comme plat de résistance. Enfin, au dessert, un affrontement entre les deux héros qui n'est guère plus qu'une sous-réfection du face-à-face Terry Thomas/Peter Sellers qui avait conclu le Tom Pouce de George Pal cinq ans plus tôt.
En résumé, encore un bel exemple de comédie américaine à la réputation surfaite et une preuve de plus que les virtuoses du cinéma d'horreur font rarement de bons clowns.
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