Ce "Mensonges d'état" pourrait très bien se situer dans la continuité logique du "royaume", la succession de plan final ne laissant aucune issue dans la voie de la paix, mais c'est mal connaitre Ridley Scott qui ne pouvait se contenter d'une vulgaire suite.
Ce dernier s'inspire de l'attentat de Sheffield, n'oublions pas qu'il est britannique, pour positionner le début de son film dans une scène forte et spectaculaire. Les agresseurs restent plus que jamais déterminés à aller jusqu'au bout de leur "combat" et la mort n'a pas tout à fait la même signification à leurs yeux. Le prologue très intéressant de Russell Crowe et ses mises en gardes cautionnent le fait qu'il serait fatal de sous-estimer un ennemi qui s'adapte sans cesse aux nouvelles technologies de surveillance, et sans une bonne infiltration, tous les gadgets du monde moderne ne sauraient arrêter le terrorisme. Le décor est planté, on suit le couple di caprio-crowe où les intérêts ne sont pas tout à fait les mêmes, l'un sert l'état sans états d'âmes, l'autre plus chevalier blanc n'a pas le même recul de la vision froide de l’administration étoilée en voyant tomber autour de lui des innocents transformés en leurres. L'intervention d'un éminent diplomate jordanien, jette un peu plus le trouble quant aux relations délicates de ce monde arabe si différent de notre culture.
Le titre original de l'adaptation était "Pénétration", un terme totalement retranscrit sur pellicule mais malheureusement la métaphore trop impudique a aseptisée son titre en "body of lies". Ridley Scott filme cette guerre sans concession, l'explosion du 4x4 ou Leonardo reçoit les fragments d'os de son collègue nous rappelle que ce conflit blesse autant l'esprit que la chair. Il évite cependant la surenchère d'hémoglobine, distillant les scènes d'actions en faisant monter intelligemment la pression avec cette scène finale de torture et son épilogue fidèle à une situation tellement ambiguë.
Leonardo Di Caprio est une nouvelle fois excellent, très proche du rôle qu'il tenait déjà dans Blood diamond, Russell Crowe pour sa 4ème association avec le réalisateur est de par son rôle plus effacé, le rond de cuir par excellence qui dirige sans se salir, un rôle peu flatteur mais honorablement interprété.
Mark Strong est la bonne surprise de ce casting, il incarne parfaitement le diplomate nébuleux, Golshifteh Farahani amène la beauté et l'espoir d'une relation entre deux cultures, et si l'issue se trouvait dans l'amour, cela reste manichéen mais porteur d'espoir.
Au final cette oeuvre n'a pas trop à rougir dans la filmographie de ridley scott , le réalisateur privilégie certes un peu trop les dialogues à l’action en voulant démontrer toute la complexité de ce conflit, mais cela reste un plaidoyer intéressant.
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