Terence Fisher réalise Les maîtresses de Dracula en 1960. Le film est à part dans la saga des Dracula poduite pour la Hammer Films : tout d’abord, Christopher Lee, qui interprétait le sanglant Comte dans Le cauchemar de Dracula en 1958 ne veut pas endosser une nouvelle fois le rôle, diverses raisons ayant été évoquées (peur d’être enfermé dans le rôle, non respect de l’œuvre originale de Stoker, …). Voulant tout de même capitaliser sur le succès du précédent opus, "Dracula" sera inséré au titre sans voir ledit personnage dans le film, une voix-off indiquant en début de métrage que le compte est bien mort, mais que des disciples restent actifs… De fait, le film est hors continuité par rapport au reste du cycle : ainsi, le début du Dracula, prince des ténèbres réalisé par le même Fisher en 1965, reprendra la fin du Cauchemar…, omettant ainsi les péripéties du second film et permettant la réapparition de Christopher Lee en Dracula (qui, finalement, incarnera le comte encore à de nombreuses reprises, notamment dans Une messe pour Dracula, Dracula et les Femmes, Dracula 73 ou encore les Cicatrices de Dracula, rien que ça !).
Si Dracula n’est pas présent dans le film, son adversaire de toujours, le professeur Van Helsing, toujours interprété par Peter Cushing, est bien présent. Terence Fisher, qui se sent tout à fait à l’aise dans l’illustration de ce grand mythe littéraire, va profiter de ce nouveau film pour pousser plus loin la réflexion sur le vampirisme, le vampire du film allant jusqu’à vampiriser sa propre mère, avec tout la connotation sexuelle dérangeante que cela entraîne. De plus, la jeune fille responsable de la libération du vampire et donc de sa puissance destructrice fait ce geste par pulsion amoureuse, croyant aveuglément que le vampire l’aime en retour. Le personnage de la mère castratrice est d’ailleurs excellent, ambiguë, qui de bourreau sans équivoque deviendra victime sans plus aucune forme de pouvoir, et on arrive à être tout à fait bouleversé par la mort de ce personnage.
Christopher Lee est le vampire le plus charismatique de l’histoire du cinéma, son remplacement par un acteur plus jeune est tout de même préjudiciable au film, même si l’important n’est pas vraiment là, comme on a commencé à le voir plus haut. Terence Fisher profite de l’exercice en affûtant tous les aspects du cycle à venir, notamment avec son chef opérateur, Jack Asher, qui réussit des alliances de couleurs vraiment magnifiques, et faisant des personnages vampirisés des figures presque en noir et blanc, montrant bien qu’elles n’appartiennent plus au monde coloré des vivants ; mais, pas mortes non plus, elles forment un pont symbolique entre la vie et la mort, conduisant leurs victimes vers l’obscurité du trépas.
Alors, quelques petites choses viennent entacher l’ensemble, comme les chauves-souris artificielles, le jeune David Peel, pas très convaincant, mais bon : ne boudons pas notre plaisir devant un Hammer film majeur, et un excellent Terence Fisher.
Un film vraiment magnifique à tous points de vue, qui approfondie notablement le mythe du vampire au cinéma.
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