Avec ce "Marebito", le réalisateur Takashi Shimizu, l'auteur notamment de "The grudge", nous livre une oeuvre underground, expérimentale qui aura largement de quoi déconcerter son spectateur, au risque de l'ennuyer profondément s'il n'arrive pas à rentrer dans l'univers passablement tordu et onirique du film.
Le script suit un homme, cameraman qui filme tout ce qu'il peut, cherchant à percer le mystère entourant un suicide brutal d'un homme dans le métro qu'il a pu filmer. son périple l'entraînera dans les profondeurs des sous-sols de Tokyo où il découvrira une jeune fille nu et attachée, qu'il décidera de remonter à la surface et "d'éduquer", à ses risques et périls.
C'est en s'accompagnant d'une voix-off persistante que le personnage principal se présentera au spectateur afin de le faire pénétrer dans son univers abstrait entièrement meublé d'images vidéos tournées par ses soins, et plus particulièrement ce suicide violent d'un homme s'enfonçant un couteau dans l'oeil filmé dans le métro de Tokyo, qui poussera notre homme à vouloir percer le secret du regard terrifié du suicidé avant son acte capté par sa caméra. Pour ce faire, il ira s'enfoncer dans les bas-fonds et les sous-sols souterrains de la métropole, pour une quête presque mystique, peuplée de légendes urbaines évoluant dans un univers surnaturel, jusqu'à ce qu'il découvre cette jeune fille nue, attachée et hagarde, qu'il remontera à la surface, dans son appartement, afin d'essayer d'en savoir plus, jusqu'à ce qu'il découvre l'horrible condition de la demoiselle, celle-ci ne pouvant s'alimenter qu'avec du sang humain.
Tout au long de son métrage, le réalisateur alternera avec plus ou moins de réussite les plans tournés par son personnage avec ceux propres au film, et plus particulièrement dans la première partie, rendant ainsi l'action trouble et assez nébuleuse, d'autant plus que la réalité se retrouve régulièrement intimement liée avec ce que l'on pourra considérer comme des délires issus de l'imagination du personnage principal qui parle aux morts et voit des créatures fantasques roder autour de lui, le tout étant agrémenté d'images quasiment subliminales nous faisant ainsi partager la folie insidieuse ambiante.
La découverte de la jeune fille permettra au film d'entrer dans sa seconde partie et de redevenir quelque peu plus "terre à terre" pour nous décrire cette relation assez spéciale, bien qu'improbable, qui prendra une allure définitivement malsaine lorsque le personnage principal découvrira le besoin d'hémoglobine permanent de sa protégée, l'entraînant dans une spirale de déchéance macabre aliénante.
Par contre, il ne faudra pas s'attendre à un déluge d'atrocités, le réalisateur préférant largement se concentrer sur la quête continue et surtout désabusée de son protagoniste sur l'origine de la peur et de la terreur, même si quelques séquences restent quand même douloureuses ( notamment le final ).
Mais à vouloir déstructurer ainsi son récit pour mieux se livrer à des "expériences" visuelles, certes dérangeantes, le réalisateur oublie quelque peu de donner un but à son métrage, celui-ci n'arrivant que très rarement à distiller une angoisse sourde et diffuse pour au contraire plonger son spectateur dans un ennui poli et distrait quasiment uniquement perturbé par la présence malsaine et animale de la demoiselle aux envies très sanguinaires.
L'interprétation demeure convaincante, portée par Shinya Tsukamoto, lui-même réalisateur de quelques oeuvres bien spéciales comme "Gemini" ou bien entendu son fameux "Tetsuo", alors que la mise en scène de Takashi Shimizu prolongue assurément l'atmosphère étrange qui règne sur l'ensemble du métrage grâce à des plans tordus et innovants.
Donc, ce "Marebito" se révélera être une expérience déconcertante de bout en bout, mais ce genre d'exercice de style ne pourra pas plaire à tout le monde, surtout aux amateurs de frissons qui en seront pour leurs frais !
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