Réalisé en 1967 par l’immense Masaki Kobayashi, auteur notamment de La condition de l’homme, Hara-kiri ou encore Kwaidan, Rebellion est un chambara (film de sabre japonais) extrêmement marquant, filmé dans un noir et blanc magnifique.
Le film oppose l’individu face à un système politique oppressant, presqu’abstrait, qui finit par le broyer complètement, dans un Japon féodal mais qui pourrait être contemporain. Le ronin Isaburo Sasahara interprété par le grand Toshiro Mifune, qui s’est toujours plié aux exigences du système, décide à sa retraite de soutenir son fils, que ce pouvoir veut marier à l’une des concubines (interprétée par la belle Yôko Tsukasa, héroïne du merveilleux Fin d’automne de Yasujiro Ozu) du shogun, tombée en disgrâce pour rebellion. Lorsque le shogunat veut la récupérer alors que le fils de Mifune est tombé amoureux de la jeune femme, Isaburo décide de braver ce pouvoir. Toute sa révolte, toutes ses vexations passées, s’expriment alors dans le bras de fer qu’il engage avec le shogunat. Pour son fils, pour celle qui est devenue sa bru mais surtout pour lui, lui qui veut exister, qui veut tout bonnement être libre. Même si rien ne peut hélas plier ce pouvoir abstrait et écrasant, Isaburo Sasahara ne subit plus, l’obligeant à se battre en duel contre son ami (joué par Tatsuya Nakadai) resté à la solde du gouvernement mais qui comprend néanmoins les agissements d’Isaburo. Tout finira très mal, mais ce qui compte est le fait de prendre conscience de l’inhumanité du régime et d’essayer d’agir pour soi-même, non pour un système qui ne se préoccupe pas des gens. Rebellion est un film dur et tragique qui permet à Kobayashi de critiquer le régime japonais. Le cinéaste met son sens aigu de l’esthétique et sa science millimétrée des plans dans ce pamphlet virulent contre la tyrannie et livre un de ses films les plus forts et les plus politiques.
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