Curieux film que cet "Exorcisme d'Emily Rose", mélange inédit du "film de procès" et du film d'épouvante, pour un résultat certes bien prenant mais qui par son orientation évidente et son découpage perd de son impact.
Le script nous conte l'histoire ( vraie, jusque dans quelle mesure ? ) de la possession démoniaque d'une adolescente, au travers du procès intenté au prêtre qui l'a suivi durant la période précédant sa mort.
Découpé chronologiquement, le métrage suit donc ce procès original mettant en cause ce prêtre ayant conseillé et suivi sa jeune paroissienne apparemment possédée, dans la plus pure tradition de ce style de films, en exposant les faits et en nous faisant écouter les témoins avec la traditionnelle opposition accusation/ défense, tout en dressant le portrait et en nous racontant le calvaire d'Emily au cours de nombreux flash-back venant régulièrement agrémenter le métrage, donnant largement du relief et du rythme à une structure plutôt molle.
Et si le métrage arrive assez facilement à captiver son spectateur et à le tenir en haleine jusqu'au final en demi-teinte, grâce à une histoire présentée simplement mais dont l'enjeu interpelle forcément, il peine grandement à s'assurer la réussite de son côté terrifiant. En effet, de par son découpage calibré, les séquences pouvant potentiellement générer quelques frissons ( les flash-back ) sont balisées, nous avertissant ainsi de la venue des scènes-chocs du film, éliminant de façon radicale l'espoir de tout suspense, de toute montée d'un minimum de tension que seule la longue séquence de l'exorcisme proprement dit parviendra péniblement à atteindre, mise à l'étroit dans les carcans du genre, même si quelques effets seront quand même relativement efficaces ( la contorsion dans l'église ).
Mais surtout, ce que l'on pourra reprocher au film, et bien que ses auteurs s'en défendent ( cf. les bonus ), c'est son parti-pris évident, allant dans le sens religieux, aussi bien exposé par certains faits cherchant à authentifier la version du prêtre, que par le point de vue émanant de la défense pris par le réalisateur, et ce dès le début de l'intrigue et allant en totale contradiction avec le doute censé ressortir de la partie "procès".
De plus, la possession est ici représentée de façon bien sage et les démons ayant théoriquement envahi la jeune fille sont très chastes et ont un langage bien policé ( on est bien loin des vociférations de Linda Blair et des éléments graphiques de "L'exorciste" ).
Heureusement, l'interprétation est très juste, Jennifer Carpenter est remarquable de réalisme et la mise en scène du réalisateur arrive à dynamiser les scènes fortes du film, qui contrastent agréablement avec le reste, beaucoup plus posé, et la photographie du film, splendide, apporte un non négligeable plus à l'ensemble.
Donc cet "Exorcisme d'Emily rose" offre un bilan mitigé et aurait largement gagné à être plus incisif !
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