DVD A LA LOUPE

Résumé : Naufragés du futur sur une planète inconnue, trois astronautes se retrouvent dans un monde où les singes ont pris la place des hommes. Rescapé des rafles, la vie de l'un d'eux, Taylor, ne tient plus qu'à la bienveillance de deux chimpanzés persuadés qu'il est le fameux chaînon manquant de l'histoire de l'évolution. Mais encore leur faudra-t-il franchir la zone interdite pour prouver la véracité de leur théorie...

Avis : Film culte par excellence, "La planète des singes" est une adaptation réalisée par Franklin J. Shaffner du roman de science-fiction écrit en 1963 par Pierre Boulle, et son succès mondial conduira à la production d'une saga de cinq films au total, sans parler des séries télévisées et du remake réalisé en 2001 par Tim Burton, sur une trame assez différente. Si ce succès mérité trouve sa source dans un scénario astucieux avec un côté aventures à rebondissement, et dans des maquillages particulièrement réussis, il est aussi indéniablement lié à la révélation finale qui avait constitué un véritable choc pour tous les spectateurs, surtout dans le contexte de l'époque alors que les grandes puissances se livraient à une course effrénée dans la puissance des engins thermonucléaires. Aujourd'hui l'impact de ce dénouement, un des plus grands moments de l'histoire du cinéma, a un peu perdu de sa force, d'autant plus que la plupart de ceux qui regardent ce film, sauf peut-être les plus jeunes, savent à quoi s'en tenir. Néanmoins cette vision futuriste, qui approche de ses quarante ans, a peu vieilli et se laisse regarder avec toujours autant de plaisir.

Derrière le verni science fiction se trouve une dénonciation de la tyrannie et de l'obscurantisme, la société des singes, cauchemardesque, caricaturant toutes les déviances que l'on trouve aujourd'hui dans le monde : dictature, intolérance religieuse, arbitraire, racisme, torture… Et comme dans nos sociétés humaines, des êtres cherchent à comprendre et faire évoluer des systèmes archaïques, quitte à encourir les foudres du pouvoir en place et des religieux dogmatiques. La parabole, bien que simplifiée et assez manichéenne, a beaucoup de force, et est couronnée par un final bouleversant de par son pessimisme noir. Le film est servi par un excellent casting, dominé par un Charlton Heston (l'astronaute Taylor) au sommet de son art, participant, après "Ben Hur" et "Les dix commandements", à un troisième monument du cinéma. Son personnage, d'abord assez hautain et peu sympathique, évolue vers plus d'humanité quand il se trouve réduit en esclavage par les singes, cette évolution montrant le souci des scénaristes Michael Wilson et Rod Serling d'éviter les caractères trop stéréotypés. A part la jeune Linda Harrisson (Nova, une humaine primitive vivant sur la planète des singes), les autres acteurs principaux sont cachés derrière des masques de gorilles, d'orang-outangs ou de chimpanzés, mais cela ne retire rien à leurs qualités de comédiens, et Roddy McDowall (Cornélius), Kim Hunter (Dr Zira) et Maurice Evans (Dr Zaïus) réussissent à rendre parfaitement crédibles ces singes intelligents et évolués qui dominent un monde où les hommes sont restés à un stade primitif. Les deux autres astronautes naufragés avec Taylor, Landon (Robert Gunner) et Dodge (Jeff Burton), ont un rôle plus effacé, car ils disparaissent assez vite, et de manière tragique. Le message philosophique véhiculé par "La planète des singes" passe d'autant mieux que le rythme du film est vif et soutenu, avec un bon suspense et certaines scènes très fortes. L'aspect visuel est soigné, avec des décors naturels imposants (la chute dans le lac du vaisseau spatial endommagé), une reconstitution réussie du village des singes, des costumes et surtout des maquillages remarquables, ces derniers étant dus à John Chambers qui reçu à cette occasion un Oscar d'honneur (le poste maquillage a englouti près de 20% du budget du film, ce qui est considérable). L'utilisation par Schaffner d'angles de vue recherchés et originaux (les prises au raz du sol, les jeux de zoom…) participe également au ressenti visuel très favorable.

Ce film fut rapidement suivi par "Le secret de la planète des singes" (1970), "Les évadés de la planète des singes" (1971), "La conquête de la planète des singes" (1972) et "La bataille de la planète des singes" (1973). Aucune de ces suites n'a retrouvé la puissance philosophique et émotionnelle du premier volet, et elles ont même été assez préjudiciables à son caractère pourtant mythique, car le fait de rallonger la sauce a donné à la saga une image globale très moyenne. D'ailleurs Charlton Heston, défavorable à ces suites s'en est très vite désolidarisé, n'acceptant qu'une apparition assez brève dans le deuxième volet.

 
La planète des singes - Edition prestige / 2 DVD