Pour son premier "vrai" film, Lucky McKee nous offre une oeuvre pleine, authentique et jouant savamment avec nos émotions. Le portrait de cette jeune femme, handicapée par un strabisme, timide et socialement inadaptée qui va peu à peu sombrer dans une folie destructrice est parfaitement rendu par le réalisateur. En effet, celui-ci arrive d'emblée à rendre son personnage principal irrésistiblement attachant et c'est avec un étrange mélange de malaise et de compassion que nous assistons à ses différentes désillusions, tout en se sentant impliqué, tant le réalisateur arrive à nous communiquer les sentiments ressentis par May, nous faisant ainsi traverser toute la gamme d'émotions au fil du métrage. L'inadaptation de l'héroïne qui va peu à peu se transformer en démence est ici retranscrite de façon on ne peut plus maîtrisée, la mise en parallèle avec le verre de la boîte de la poupée en étant le symbole simple mais fort. Heureusement, pour alléger quelque peu la noirceur du tableau, un humour subtil et frais est distillé tout au long du film, surtout véhiculé par les protagonistes secondaires, notamment la collègue lesbienne de May. La dernière partie du métrage apportera son lot de séquences fortes et douloureuses ( le final, triste et pathétique à la fois, mais aussi la séquence terriblement éprouvante où les jeunes aveugles cassent la vitre de la boîte à poupée ), et laissera un goût amer au spectateur, celui-ci ayant véritablement l'impression d'avoir assisté à une expérience rare, unique ! L'interprétation est on ne peut plus réaliste et l'actrice principale, Angela Bettis a certainement trouvé ici le rôle de sa vie, tant la maîtrise de son personnage est totale, vivante et même surprenante. "May" est donc un film émouvant qui parvient avec une facilité déconcertante à faire participer son spectateur, ce qui est suffisamment rare pour être plus que souligné !
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