Sean Penn (The crossing guard, 1995) propose un film attachant et nous fait regretter qu’il ne passe pas plus souvent derrière la camera.
Jerry Black (Jack Nicholson), inspecteur de police dans le Nevada part à la retraite. Ce même jour, une fillette, Ginny Larsen est découverte assassinée. L’inspecteur promet aux Larsen de découvrir l’assassin de leur fille.
Toute la force du film réside dans ce mouvement subtil qui va de l’enquêteur à son enquête car les deux sont indissolublement liés. Féru de pêche au lancer, riche d’une longue expérience professionnelle, solitaire et peu communicatif mais respectueux des autres, Jerry Black utilise des méthodes policières qui sont le reflet même de son tempérament. Tout se met donc en place peu à peu selon une méthode éprouvée : ne pas troubler l’eau de la rivière, montrer patience et discrétion avant de lancer l’appât ; puis attendre, en se plaçant au bon endroit, de ferrer la proie quand elle sera accrochée. Bref, on l’aura compris, la pêche est la métaphore de l’enquête.
Encore faut-il compter sur la bienveillance du hasard, cet impondérable qui peut tout bouleverser…
A travers son personnage principal, Sean Penn nous entraîne dans une enquête policière qui se double d’une enquête sur l’Amérique profonde où se découvrent des personnages floués par le destin mais d’une résignation désarmante et d’une humilité bouleversante (les parents de Ginny), ou encore traversés de croyances primitives (la grand-mère de Ginny), hantés par les notions de Bien et de Mal. On sent toute la compassion de Sean Penn pour ses personnages et, notamment, pour son policier si honnête, si semblable à ceux à qui il a fait sa promesse et pour qui il enquête.
Les paysages du film sont à l’unisson de son propos : d’abord, dans l’hiver neigeux et glacial de la solitude, de la vieillesse et de la mort (simultanéité du départ à le retraite et de l’assassinat de la fillette), ils s’humanisent ensuite à mesure que Jerry Black rencontre, échange et partage avec les autres, oubliant, croit-on, son enquête au profit de son bonheur personnel.
Un beau film au rythme lent comme celui de la vie lorsqu’elle semble devenir immobile sous le poids du chagrin.
|