Journée noire pour un bélier recèle tous les codes du giallo : chantage, sexe, héros suspectés, cuir et meurtres sadiques. Assistant de Mauro Bolognini sur le film Le Bel Antonio, le réalisateur Luigi Bazzoni déploie un scénario machiavélique avec le concours de collaborateurs expérimentés et inattendus comme Ennio Morricone ou Vittorio Storaro, chef opérateur trois fois oscarisé pour Apocalypse Now, Reds et Le Dernier Empereur. Au générique des acteurs, on retrouve Franco Nero, Silvia Monti, Agostina Belli (inoubliable dans Parfum de femme) et Ira Von Fürstenberg.
Cette référence du giallo conserve son efficacité narrative. Dès le générique, le spectateur est plongé au beau milieu de la nuit du réveillon de la Saint Sylvestre. L’alcool coule à flots. Au petit matin, les convives sortent éméchés d’un club à la mode parmi lesquels Andrea, journaliste criminologue et amateur d'alcool. Ce dernier doit se rendre à l’évidence : dès le lendemain des festivités, les invités de cette soirée mémorable commencent à se faire assassiner les uns après les autres. Le tueur se manifeste dès les premières secondes du film via un message enregistré avec une voix déformée qui annonce la mort de cinq personnes : la séquence initiale du film s'avère prémonitoire.
Andrea va devenir le lien entre le réalisateur et le spectateur qui suit ce personnage désabusé, volage et insomniaque qui se retrouve plongé malgré lui dans une affaire où il va devoir s'investir puisqu'il devient même un suspect potentiel.
Le génie du réalisateur est de jouer et déjouer avec les impressions du spectateur. Si on devine quand l’assassin va frapper, la direction artistique s'ingénie avec succès à toujours surprendre le spectateur grâce à une alliance maîtrisée de la mise en scène, du rythme, du cadre, des contrastes grâce à un montage qui amplifie les angles de prises de vue dans une jungle de bâtiments en béton assez kafkaïenne.
Si l’intrigue s'égare par moments, Journée noire pour un bélier fait et fera le bonheur des cinéphiles amateurs de sensations avec quelques séquences inédites comme le meurtre d'une femme handicapée et la poursuite d'un enfant par une sorte du croque-mitaine. Cela ne s'invente pas !
Une belle édition signée Le Chat qui fume.
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