Vierge sous serment est le premier long métrage de la réalisatrice italienne Laura Bispuri à l'écriture assez conventionnelle dont le thème est insolite.
L’Albanie est un pays tout proche à moins une centaine de kilomètres du port italien de Brindisi. C’est là, dans un petit village de montagne que se perpétuent des coutumes d’un autre âge, d’origine ottomane, qui subsistent encore dans les provinces de l'ex-Yougoslavie autour de l'Albanie.
Vierge sous serment montre, sans discours moralisateur, avec les images de plusieurs flashbacks, la condition réservée là-bas aux femmes. L’une des plus marquantes est celle de la balle que le père dépose dans le trousseau de sa fille : une balle que le futur mari pourra utiliser si elle ne lui donne pas satisfaction.
La scène la plus poignante est celle du serment dans la seconde moitié du film. Hana, est entourée par les hommes du village, la poitrine comprimée par un bandage, habillée en homme, quand on lui coupe les cheveux. Elle devient Mark en prononçant un serment qui lui permettra d’échapper à un mariage arrangé et à une vie de soumission.
Un autre moment marque les esprits : Hana et sa soeur, encore adolescentes, veulent savoir pourquoi une mariée, juchée sur un âne, a le visage recouvert d’un voile. La réponse est lourde de signification : elle ne doit pas retrouver le chemin qui la conduit chez son mari qui la possède corps et âme désormais.
L'autre point fort du film est son scénario qui se dévoile peu à peu au spectateur. Hana, dans une courte séquence introductive, nous est montrée dans son quotidien : travail avec les hommes et isolement total dans une masure à la fin de la journée. Puis, dans une scène dont on devinera ensuite la portée symbolique, elle embarque à bord d’un bateau pour descendre le cours d’une rivière comme étouffée entre deux parois rocheuses verticales. Cette première étape d’une échappée comme une évasion la conduit à Milan où commence l’exploration par Hana d’un monde inconnu.
Avec une économie délibérée de dialogues, la caméra suit la jeune femme pour mieux nous faire ressentir ses émotions comme la découverte de magasins de lingerie ou du corps exposé des jeunes filles du club de nage synchronisée qu’elle aime venir voir à la piscine.
Hana est interprétée avec une touchante sobriété par Alba Rohrwacher remarquée dans Hungry Hearts de Saverio Costanzo.
Vierge sous serment nous montre, par touches successives, la lente adaptation de Hana à son nouvel environnement, ses premiers pas maladroits vers une sexualité qu’elle s’était interdite, tout en nous laissant imaginer son destin futur. Redeviendra-t-elle une femme ou trouvera-t-elle son équilibre en restant sereinement dans l’ambiguïté vers laquelle elle fut poussée ?
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