Grâce au talent, à l'audace et à l'inventivité de ses auteurs, le film, qui n'aurait pu être qu'un exercice de style appliqué, dépasse les lois du genre pour offrir une réflexion vivante sur la représentation de la violence au cinéma. Par-delà le naturel confondant avec lequel le héros, interprété par Poelvoorde, expose ses techniques et motivations en joignant le geste à la parole (on assiste à une bonne quinzaine de meurtres "en direct" doctement commentés), les réalisateurs autopsient la relation ambiguë qui se crée entre le psycho killer et l'équipe cinématographique chargée de le filmer. A un moment, le héros, occupé à fracasser le crâne d'un quidam sur un lavabo, s'interrompt pour signaler une référence au Vieux Fusil, à un autre, il demande de l'aide au rélisateur pour maîtriser sa victime. Et, à l'instar de l'équipe technique, le spectateur se retrouve complice de ce jeu de massacre. D'autant qu'entre deux scènes d'action, ce pseudo-reportage nous invite à partager l'intimité du protagoniste, ses ballades et beuveries au cours desquelles il nous livre ses hilarantes méditations sur l'art et la vie avant de nous présenter à sa famille, petits commerçants qui ignorent la double vie de leur fils. Le propos s'enrichit alors d'un portrait au vitriol d'une société gangrenée par la bêtise et l'ignorance.
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