Thriller nerveux en huit-clos où se mêlent réflexion sur la torture et les limites imposées par notre civilisation moderne, ce "No limit" ne va pas ménager son spectateur, non pas en virant au "torture-porn" bien sûr, mais en le positionnant dans une situation inconfortable au possible, où bourreaux et victimes se mélangent tout en nous réservant des surprises salées.
Le script va laisser un américain expert en explosifs et reconverti à l'islam poser trois bombes dans trois villes américaines avant de se faire arrêter. Commencera alors un interrogatoire plus que musclé dicté aussi bien par la course contre la montre imposée que par les méthodes brutales d'un sinistre individu commandité par le gouvernement pour faire parler le poseur de bombes.
Le métrage commencera par avancer le vidéo amateur tournée par un homme se déclarant citoyen américain et islamiste avant de se lancer dans la présentation des personnages principaux, à commencer par l'agent Brody, responsable de la cellule antiterroriste au F.B.I. qui va collecter des informations auprès de ses lieutenants, avant d'entendre par les informations télévisuelles parler d'un homme fiché, un certain Younger, bien évidemment l'homme vu en introduction et qui deviendra sa priorité sans qu'elle ne sache encore pourquoi, dans une tentative de suspense bien dérisoire pour qui aura lu le résumé avant de lancer le film.
Au cours des interrogatoires lancés suite à cette nouvelle menace, elle sera amenée à rencontrer un certain H, aussi cynique que vite libérée et qu'elle retrouvera peu de temps après dans un quartier général de crise installé dans une ancienne école. Le métrage ne s'attardera pas sur cette présentation des protagonistes pour ainsi lancer véritablement son intrigue et placer les enjeux, avec ce Younger disant avoir posé trois bombes nucléaires dans différentes villes américaines, bombes devant exploser quatre jours plus tard, si ses exigences pour le moment inconnues ne sont pas respectées.
C'est alors que H va se mettre en action, avec l'approbation du gouvernement (nous passerons sur ces situations liées au droit à l’interrogatoire entre l'armée et le F.B.I.), pour torturer ce Younger, au grand dam de l'agent Brody qui assistera impuissante au calvaire enduré par ce supposé terroriste, car bien entendu, malgré son passé et la disparition de matériel nucléaire, rien ne prouvera que les bombes existent, mise à part cette vidéo tournée par Younger.
Malgré quelques plans ou brèves séquences corsée (les ongles), le métrage ne s'attardera pas outre mesure sur les tortures infligées au terroriste supposé pour préférer s'attacher aux différents personnages, ce H intrigant, glacial dans sa besogne et manipulateur, mais aussi cet agent Brody, qui incarnera l'humanité refusant ces tortures, tandis que ce Younger s'avérera être bien plus calculateur que prévu comme nous le prouvera une séquence charnière qui lancera une seconde partie où le titre du métrage (titre français traduisant dans un anglais plus basique le titre original "Unthinkable", impensable) prendra véritablement toute sa signification jusqu'à son final terrible et effectivement impensable dont l'impact ne sera pas amoindri par la dernière séquence et son dénouement quand même attendu.
Mais la réussite du métrage tiendra surtout dans son art de s'approcher dangereusement des limites du tolérable pour l'être humain moderne, confronté ici à des sévices issus du passé et infligées par ce bourreau machiavélique qui cherchera à faire craquer le terroriste... pour une bonne cause puisqu'il s'agira de sauver des millions d’américains innocents, plaçant de fait le spectateur devant un choix incertain et sordide, se ranger du côté du bourreau ou refuser ces tortures, choix de plus en plus cornélien au fur et à mesure de l'avancée de l'intrigue et de la montée de cette tension implacable qui ne faiblira jamais jusqu'au final étourdissant.
L'interprétation est largement convaincante, avec un Samuel L. Jackson impeccable pour camper ce H aussi imprévisible que dangereux, tandis que Carrie-Anne Moss ne déméritera pas pour jouer l'agent Brody. La mise en scène du réalisateur est probante pour gérer cette unité de lieu étouffante en ayant la bonne idée de ne pas en sortir pour des péripéties inutiles, générant ainsi une tension réelle et impitoyable.
Donc, ce "No limit" osera s'aventurer sur des terrains pour le moins glissants et dangereux, mettant aisément à mal le spectateur confronté à des choix intenses et délicats, tout en préservant un suspense remarquablement entretenu jusqu'au final sans... limites !
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