Les Proies est un film intimiste, un peu théâtral, où les êtres sont pris dans un huis clos dramatique (un pensionnat de jeunes filles), s'observent puis se déchirent après s'être utilisés de façon égoïste avec un côté expérience de laboratoire qui accroît le pouvoir de séduction de ces "cérémonies secrètes". Et sur ce théâtre la femme est souveraine même si l'homme nourrit la prétention ou l'illusion de dominer. A travers l'étonnante galerie de ces portraits de femmes offrant l'éventail le plus ouvert qui se puisse rêver de la sexualité féminine (de la vieille fille traumatisée par ses relations incestueuses avec son frère, à la jeune fille sentimentalement bloquée par le souvenir de la conduite paternelle, à l'adolescente nymphomane, à la fillette dont la sensualité s'éveille...), Siegel fait passer son public de la mysoginie la plus cruelle à la misanthropie la plus noire puisque l'enfance n'y est pas davantage épargnée. Mais le film ne tombe jamais dans une misogynie facile et vulgaire. Le film se déroule pendant la guerre de Secession que l'on ne vivra que sous forme de documents fixes en introduction, ou bien de projections mentales. Mais l'antagonisme n'est pas entre le Nord et le Sud. Il est ailleurs, plus solidement ancré encore, entre les sexes. Probablement un des meilleurs filme de Siegel avec A bout portant.
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