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Toute initiation est un passage, une traversée des apparences pour découvrir un monde différent. Il y a deux mondes à Lumberton. D'abord celui extérieur d'une petite ville américaine tranquille. Le ciel est bleu, les clôtures et les maisons blanches, le gazon vert, les parterres composés de tulipes jaunes. Une voiture de pompiers traverse au ralenti la douce chaleur de l'été. C'est une imagerie composée comme un tableau de Norman Rockwell qui serait fait avec les couleurs des nouveaux réalistes. L'autre monde est celui que va découvrir Jeffrey Beaumont à l'issue d'une escapade nocturne dans un appartement où il va s'immiscer pour espionner et exercer son voyeurisme presque inconscient. Ce monde intérieur, lieu de la chanteuse de cabaret Dorothy Vallens, est celui des plaisirs sexuels, des perversions, de la violence, du chantage, de la drogue et de la corruption. Une chanson interprétée de deux façons différentes unit ces deux mondes. Blue Velvet de Bobby Vinton qui donne son titre au film est dans sa version rythmique originale, utilisée pour la partie lumineuse de Lumberton. L'autre version est une adaptation chantée par Dorothy Vallens au Slow Club. La chanson est alors complètement transformée, cassée, dérythmée, rendue pathétique. A travers le personnage de Beaumont, le film nous fait constamment passer d'un univers à l'autre. Beaumont va faire naviguer sa petite amie, Sandy Williams, entre les deux mondes. Elle est saine , blonde, américaine type. Elle ne peut que rejeter toute déviance d'où son regard horrifié à la vue de Vallens, nue, meurtrie. Beaumont va tenter d'éclaircir un mystère policier, mystère émotionnel aussi d'un monde nouveau pour lui. Il se trouve au milieu d'un ensemble d'émotions inconnues : peur, violence, fascination, provocation masochiste, qu'il n'arrive pas à gérer. Dans la scène suivante il assiste en voyeur-spectateur aux mêmes émotions mais d'une intensité décuplée. Frank, dopé à l'oxygène, exerce une terrible domination sur Dorothy débouchant dans une violence physique extrême. A la fin du film, le mystère éclairci, on peut imaginer que Beaumont a traversé le pont qui mène à des expériences et des sensations adultes.
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