"Breezy" est très certainement le film le plus méconnu et le plus mésestimé de Clint Eastwood en tant que réalisateur, et il y a au moins deux bonnes raisons à celà.
Tout d'abord il ne s'agit que de son deuxième film , se situant entre un thriller urbain ("Un frisson dans la nuit") et un western crépusculaire ("L'homme des hautes plaines"), et qui par la nature même de son sujet a surpris et dérouté bon nombre de spectateurs et fans d'Eastwood , plus habitués à des films d'action pure et dure de la part de celui qui incarnait à l'époque l'inoxydable et inflexible inspecteur Harry ! Par ailleurs , les détracteurs du film n 'y ont sans doute vu qu'une histoire scabreuse et dénuée d'intérêt entre un quinquagénaire et une jeune fille à peine sortie de l'adolescence.
Pourtant , "Breezy" n'a rien d'une comédie sentimentale à l'eau de rose et n'est pas non plus une oeuvre racoleuse , mais s'avère être au contraire un film tendre et souvent émouvant , l'histoire toute simple d'un amour à priori impossible entre deux êtres que rien , leur différence d'âge , de milieu social et de tempérament , ne prédisposait à se rencontrer , et qui finalement triompheront de tous les préjugés pour aboutir en fin de compte à une relation faite d'une immense estime et d'un respect mutuels...Eastwood a filmé avec beaucoup de pudeur et de sensibilité cette histoire , et a réussi un film à la mise en scène d'une rare sobriété , et c'est indéniablement ce qui rend "Breezy" aussi touchant , outre le formidable duo très complice entre William Holden en vieil ours mal léché (Clint Eastwood lui-même était initialement censé interpréter le rôle tenu par William Holden , mais y a finalement renoncé , estimant alors ne pas avoir l'âge requis pour le personnage !) et la jeune Kay Lenz ( qui n'a hélas pas confirmé en tant qu'actrice par la suite , sauf dans quelques films ou téléfilms sans grand succès. ..) en hippie malicieuse et pleine de fraîcheur et de joie de vivre.
Le film est aussi , et enfin , très ancré dans les années 70 , y compris la bande-son un tantinet trop fleur bleue , composée par Michel Legrand , et est un peu le reflet sociologique de cette époque , ce qui lui confère aussi ce cachet nostalgique si particulier. Une vingtaine d'années avant "Sur la route de Madison" , Clint Eastwood avait en tout cas déjà su prouver tout son talent à changer de registre avec ce très beau film qui , s'il n'est pas resté le plus marquant dans sa filmographie de réalisateur , est a n'en pas douter l'un des plus sincères et des plus attachants , un petit bijou rare d'émotion et d'authenticité.
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