Avec ce "Zebraman" le réalisateur Takashi Miike va nous livrer sa propre vision du film de "super-héros", c'est à dire bien déjanté, parfois à la limite de la parodie mais en même temps terriblement attachant.
Le script va suivre la transformation d'un misérable instituteur, incapable de faire preuve d'autorité à son travail ou chez lui, en un super-héros qui berça son enfance lorsque son quartier sera envahi par des extraterrestres belliqueux.
D'entrée le métrage va nous mettre au fait de cette invasion d'aliens ayant élu domicile dans un quartier d'une ville japonaise au travers de reportages télévisuels avançant des événements extraordinaires s'y déroulant et ensuite grâce à une réunion top-secret entre un responsable de l'armée et deux agents qu'il va envoyer sur place pour enquêter pour vérifier si les dires d'un journal américain concernant cette invasion sont fondés.
Parallèlement l'intrigue va avancer son personnage principal, Shihichi, un instituteur minable n'arrivant pas à mener ses élèves dans la discipline, tandis que son fils, élève dans la même école sera le bouc émissaire de ses camarades, alors que chez lui Shinichi ne parviendra pas non plus à imposer son autorité envers sa fille sortant le soir malgré son refus en raison de la présence d'un pervers assassin portant un masque de crabe, pour aller retrouver un homme rencontré sur internet, qui bien entendu se révélera être ce meurtrier. Ce Shinichi arrivera facilement à s'attirer la mansuétude du spectateur dans son quotidien malheureux, sa seule évasion étant de s'isoler pour coudre son costume de "Zebraman", un super-héros ringard d'une série télévisuelle avortée en raison d'un manque d'audience, tout en regardant justement d'autres séries stupides à la télévision, ce qui donnera au passage l'opportunité à Takashi Miike de se gausser gentiment de la vague des films de fantômes japonais en laissant une Sadako de pacotille se battre avec une sorte de "Power Ranger" dans la petite lucarne.
Pendant ce temps-là les militaires vont découvrir des preuves de la présence extraterrestre et Shinichi va devoir accueillir dans sa section un nouvel élève, Asano, un petit garçon handicapé en fauteuil roulant qui se révélera être également un fan de "Zebraman".
Mais alors qu'il s'amusait avec son costume, osant pour la première fois sortir de nuit dans les rues avec son accoutrement, Shihichi va croiser le chemin du tueur au masque de crabe et en se battant avec lui, il se rendra compte qu'il possède des forces jusque là insoupçonnées.
Ce sera le début de l'aventure de "Zebraman" qui va devoir lutter contre les envahisseurs du quartier prenant possession des corps des habitants pour les rendre agressifs et sournois.
Takashi Miike va avec ce film nous montrer une nouvelle facette de son talent, bien loin de l'horreur ou de la violence extrême d'un "Ichi the killer", pour faire preuve d'humanité avec son personnage principal qu'il va largement privilégier tout en mettant en avant sa timidité perfectible pour le rendre évidemment attachant, surtout qu'il va s'allier avec un autre accidenté de la vie, ce petit Asano adorable et qui lui donnera la force d'aller de l'avant en toutes circonstances.
Mais le réalisateur va également nous faire part de son attachement aux super-héros, avec ce "Zebraman" certes ringard et risible, mais qui deviendra au fur et à mesure des événements de plus en plus crédible pour devenir un véritable super-héros lors du final. Mais il lui aura fallut auparavant traverser les épreuves d'apprentissage souvent douloureuses pour lui mais souriantes pour le spectateur, laissant même l'intrigue l'obliger à se surpasser pour pouvoir espérer vaincre ses adversaires, lors d'un final mitigé, quelque peu facile et ne bénéficiant que d'effets spéciaux certes bien intégrés mais définitivement (volontairement ?) simplistes dans l'agencement des aliens.
L'intrigue en elle-même sera bien travaillée dans ses différents aspects, aussi bien pour faire évoluer le personnage principal que pour suivre les agissements des extraterrestres, tout en donnant une vraie vie à l'histoire de "Zebraman", héros malheureux d'une série ratée et oubliée de tous, sauf d'une poignée de fans dont fera partie aussi bien Shinichi que Asano, mais également un autre protagoniste pour nous offrir ce qui restera comme un twist bien trouvé venant justifier l'intrigue.
Mais Takashi Miike n'oubliera pas pour autant de nous livrer quelques passages bien déjantés, mettant en scène son super-héros dans des situations folles et complètement improbables, mais également avec ces aliens croustillants, avec ce tueur au masque de crabe ou encore par exemple lorsque des gamins saccageront une échoppe avec fureur et même un soupçon de violence.
Les personnages seront ici crédibles et cohérents, avec des personnalités fouillées et les rendant attachants ou souriants, tels ces deux militaires savoureux et malpolis, tandis que leurs relations serviront l'ensemble du métrage de manière effective. L'interprétation sera convaincante pour donner de l'ampleur et du réalisme aux différents protagonistes, avec un Sho Aikawa parfait dans le rôle de Shinichi/Zebraman. La mise en scène du réalisateur est efficace pour donner du rythme à l'ensemble tout en mettant en avant une certaine allégeance aux films de super-héros lors des scènes d'action. Les effets spéciaux sont hélas mitigés avec ces aliens basiques et dont l'animation restera parfois minimisée, mais pour autant cela restera bien dans le style du film.
Donc, ce "Zebraman" nous livrera un super-héros déjanté mais attachant et même émouvant dans sa ringardise heureusement volontaire de la part d'un Takashi Miike une fois encore étonnant.
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