Affichant clairement son sujet lorgnant complètement du côté du "rape and revenge", ce "Traque sanglante" ne sera pas vraiment original sur la forme mais parviendra à impliquer son spectateur en s'intéressant de près à ses personnages.
Le script suit la vengeance d'une couple, violemment battu au point de perdre un oeil pour monsieur et violée pour madame, par trois hommes au retour d'une soirée en pleine campagne.
D'entrée, le métrage va nous présenter son personnage principal, un jeune homme un peu paumé faisant son travail d'installateur de caméras de surveillance pour des particuliers chez une femme d'affaires troublante qui va sur un coup de tête l'inviter à se rendre à une réception donnée dans la demeure de son patron. Le "couple" s'y rendra et bien entendu les deux protagonistes finiront par coucher ensemble avant de prendre le chemin du retour.
Rapide, cette mise en situation des personnages privilégiera l'antagoniste régnant entre eux, entre Alice, une femme déterminée et d'apparence assez froide mais au charme troublant, surtout qu'elle n'hésitera pas à se montrer (volontairement ?) nue à l'installateur par le truchement des caméras, et Adam, cet homme plus jeune qu'elle éreinté par ses abus de drogue qui semblera bien timide et influençable, ce qui fera plus ou moins bien passer l'aspect quand même quelque peu improbable de la situation.
Mais sur la route forestière du retour de cette soirée, ils vont d'abord être ralentis par un véhicule circulant lentement qu'ils finiront par doubler, Adam se permettant un geste obscène au passage, avant de heurter un cerf. Ce sera pendant qu'ils tentaient de mettre l'animal sur le bas-côté qu'ils seront rejoints par la fourgonnette doublée auparavant lâchant ses trois occupants qui sans préambule ni ménagement vont d'abord copieusement passer à tabac Adam avant de s'en prendra à Alice qui finira comme on pourra s'en douter violée lors d'une séquence éminemment brutale mais certainement pas racoleuse ou complaisante, séquence suivie du réveil au petit matin d'Adam qui retrouvera un peu plus loin Alice prostrée et découvrira la vérité aussi bien sur ce qu'il lui est arrivé à elle que sur la gravité de ses blessures puisqu'il aura eu un œil crevé. Cette scène sera tout aussi glaçante et douloureuse car sans utiliser d'effets gratuits ou tapageurs le réalisateur arrivera aisément à faire passer aussi bien la détresse de ces deux individus que la dureté des violences commises (le filet de sang coulant le long de la jambe tremblante d'Alice).
Ensuite, l'intrigue va s'appliquer dans un premier temps à suivre le désordre moral régnant au sein de ce couple qui restera soudé dans le malheur, mais Alice reprendra plus vite le dessus (surtout qu'elle a tenu à ce que son viol reste un secret entre elle et Adam en n'en parlant pas à la police) et recommencera à travailler, laissant chez elle un Adam complètement "out" qui passera son temps à s'abrutir dans la drogue. Par un concours de circonstances bien facile, Alice va retrouver la trace d'un des agresseurs dans la campagne et va enjoindre Adam de la retrouver sur place, dans le but évident de fomenter une revanche.
Au-delà de ce schéma classique, le métrage va continuer à cerner de près les relations ambiguës au sein de ce couple, laissant Alice dominer la situation en étant la plus revancharde tandis qu'Adam semblera perdre de plus en plus pied avec la réalité, guère aidé il est vrai par la perte de sa virilité, tandis que l'univers peu reluisant du violeur identifié sera lui aussi mis en avant (mais certainement trop brièvement) pour donner un peu plus de profondeur dramatique à l'ensemble.
Mais le métrage comportera aussi son quota de scènes tendues générant un suspense relatif du fait de la prévisibilité des situations (l'installation des caméras de surveillance chez le violeur) qui déboucheront sur un dernier acte démonstratif et assez méchant (la vengeance d'Alice sera particulièrement "adaptée" et sordide) tout en interrogeant sur la justification de ce châtiment sans donner franchement de réponse (voir le dernier plan diablement efficace) et en donnant une dimension "humaine" à cette vendetta qui verra Alice faire preuve d'un semblant d'humanité alors qu'Adam, pourtant assez veule, deviendra implacable.
Ce seront bien les deux personnages principaux qui donneront un intérêt évident au métrage, celui-ci se contentant sinon de marcher dans les sentiers battus du genre, avec des références évidentes aux "Chiens de paille" de Sam Peckinpah et un clin d'oeil facile au "Thriller : they call her one eye" de Bo Arne Vibenius, pour se montrer quand même assez sauvage et brutal dans l'expression de sa violence, mais sans en abuser, notamment en faisant preuve d'une certaine pudeur qui ne fera que renforcer l'impact des méfaits commis.
Et justement, l'interprétation est convaincante, entre Danny Dyer tout à fait à l'aise dans son rôle de personnage influençable et paumé, dépassé par les événements, et Gillian Anderson qui se livrera à une prestation d'une froideur implacable mêlée d'un érotisme trouble.
La mise en scène du réalisateur est par contre assez plate et terne, sans effet.
Les quelques plans sanglants resteront réalistes et convaincants, mais le métrage ne cherchera pas s'orienter vers un terrain trop graphique à ce niveau-là.
Donc, ce "Traque sanglante" ne bouleversera pas le genre du "rape and revenge" mais restera néanmoins efficace et douloureux dans sa description des événements !
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