Django :
Réalisé par le grand Sergio Corbucci en 1966, Django marque une date dans le western italien. Très éloigné des codes du genre instaurés par le génial Sergio Leone, le film de Corbucci est d’une très grande noirceur, se déroulant dans une ville-fantôme, qui semble réduite à des ruelles sales et un saloon. Dès le premier plan, le ton est donné : un homme mystérieux, à pied, traîne un cercueil comme un fardeau dans un espace boueux. C’est l’entrée en scène de Django, interprété par un jeune Franco Nero qui vient juste d’être découvert, et archétype de l’anti-héros propre au western italien. C’est aussi la mort en marche, qui va contaminer tout le film. Corbucci instaure un climat putride et une violence hyperbolique, n’ayant pas peur de noircir de sang un tableau déjà peu reluisant. Dans une société en pleine perdition, à la limite du totalitarisme (les hommes cagoulés comme le Ku Klux Klan), les hommes crèvent comme des chiens, dans la boue, parfois dans le dos. Notre héros Django emploie sans sourciller une mitrailleuse et extermine sans la moindre compassion, il se fait aussi écraser les mains ; même le duel final tant attendu se déroule sans aucun respect des règles, dans l’anarchisme le plus total, bien évidemment dans un cimetière représentant la fin de l’idéalisme et des illusions. Corbucci ira encore plus loin dans la noirceur avec son chef d’œuvre absolu, Le grand silence. Mais Django reste un des westerns italiens les plus marquants de l’histoire du cinéma, qui a eu une influence considérable.
9/10
4 de l'apocalypse :
Ce western italien atypique a été tourné en 1975 par le grand Lucio Fulci, solide artisan du cinéma transalpin qui est ensuite devenu culte grâce à ses films d’horreur comme le sublime L’au-delà ou encore L’enfer des zombies. Deuxième incursion du cinéaste dans le domaine du western, après son magistral Le temps du massacre en 1966 et avant son mélancolique Sella d’argento en 1977, 4 de l’apoclypse suit les tribulations d’un groupe de marginaux composé d’un joueur dandy (Fabio Testi, excellent), d’une prostituée (la belle Lynn Frederick), d’un noir et d’un alcoolique, qui fuit un village dont les habitants ont été massacrés et qui tente de survivre dans un désert s’étendant à perte de vue. Proche du road-movie, le film de Fulci ne se réfère à rien de connu et donne une vision morbide et désenchantée de l’Ouest, sur un rythme lancinant. Ces 4 personnages perdus vont rencontrer sur leur chemin un homme trouble et sadique magistralement interprété par Tomas Milian qui sera le début de leur fin, sorte de grand méchant loup prêt à les manger. Dans un climat putride et poussiéreux, renforcé par une dominante de couleurs sombres et ternes, 4 de l’apocalypse est un film désespéré, où les hommes sont devenus des animaux dans une société dégénérée qui court à sa perte. Fulci n’hésite d’ailleurs pas à user d’images régressives, qu’elles soient sanglantes (une scène de cannibalisme est à cet égard assez impressionnante), ou sexuelles (le viol de la prostituée pendant qu’elle est sans connaissance), afin de secouer le spectateur. Même le héros dandy finira par user de la violence (une violence loin d’être esthétique) et se transformera en véritable barbare, lui qui voulait coûte que coûte rester humain. Malgré la belle histoire d’amour qui naît entre Testi et Lynn Frederick, écrin de lumière qui illumine le temps d’un instant éphémère (pour la seule fois du film, les couleurs deviennent plus chaudes et lumineuses) un univers noir et sans issue, la tragédie pointera inévitablement le bout de son nez, se terminant dans une vengeance loin d’être héroïque et la victoire de la sauvagerie. Bref, cet étrange western spaghetti tardif est une excellente surprise et un véritable ovni cinématographique, qui démontre la talent versatile de Lucio Fulci.
9/10
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