L'homme de Rio :
Réalisé en 1963 par le sympathique cinéaste français Philippe de Broca, auteur notamment de la très belle comédie Le diable par la queue ou du très drôle Le magnifique, L’homme de Rio est une haletante comédie d’aventures qui ne laisse aucun répit au spectateur.
Tourné de très exotiques décors naturels, le film de de Broca est une course-poursuite effrénée bourrée de péripéties. Habile mélange de comédie française (les dialogues de Daniel Boulanger sont particulièrement savoureux) et de film d’action, L’homme de Rio est porté par un bondissant Jean-Paul Belmondo (qui effectue lui-même ses cascades) et une piquante Françoise Dorléac (la sœur de Catherine Deneuve, tragiquement disparue à 25 ans dans un accident), qui prennent un plaisir communicatif à entraîner le spectateur dans une folle cavalcade. Typiquement sixties, le film est très efficacement mis en scène par de Broca dans un ton très nouvelle vague française.
Lointainement inspiré des aventures de Tintin, L’homme de Rio est une délicieuse fantaisie, une véritable bande dessinée live qui est l’un des films favoris du cinéaste américain Steven Spielberg. Rythmé par le score énergique de Georges Delerue, il conserve encore aujourd’hui intact son pouvoir d’émerveillement et de séduction.
Et puis, quelle plaisir de revoir la regrettée Françoise Dorléac, ici au sommet de sa forme et de sa beauté, agaçante mais si charmante, ne cessant pas de mettre des bâtons dans les roues de Bébel !
9/10
Les tribulations d'un chinois en Chine :
Réalisé en 1965 par le cinéaste français Philippe de Broca, auteur des célèbres L’homme de Rio ou encore Cartouche, Les tribulations d’un chinois en Chine est une adaptation assez libre du roman de Jules Verne.
De nouveau interprété par le virevoltant Jean-Paul Belmondo, cette fois-ci couplé à la sculpturale Ursula Andress, le film de de Broca marche sur les traces de L’homme de Rio, en mélangeant à nouveau la comédie et le film d’aventures, mais peut-être avec un équilibre un peu plus bancal. Si Les tribulations d’un chinois en Chine ne procure pas autant de plaisir que L’homme de Rio, le film demeure néanmoins très plaisant. Jouant à nouveau sur un rythme haletant et une succession ininterrompue de péripéties fantaisistes, le film emmène une nouvelle fois le spectateur dans des contrées exotiques qui le dépaysent totalement, ici une Chine de pacotille. Les acteurs cabotinent à outrance et s’en donnent à cœur joie, insufflant un incroyable dynamisme à l’ensemble. Il en résulte un film bourré de charme, où les personnages sont en mouvement permanent et placés au cœur d’une intrigue foutraque mais jamais ennuyeuse. Si on est très éloigné de l’univers de Jules Verne, Les tribulations d’un chinois en Chine démontre, à l’instar de L’homme de Rio, que le cinéma français savait autrefois donner naissance à des comédies d’action réussies, ce qui n’est hélas plus le cas aujourd’hui (je pense notamment aux comédies poussives produites par Luc Besson, complètement dénuées de charme, se réduisant à une mécanique vide).
8/10
La sirène du Mississippi :
Réalisé en 1968 par le grand cinéaste français François Truffaut, auteur des remarquables Les deux anglaises et le contient, Jules et Jim ou encore Vivement dimanche !, La sirène du Mississippi est une de ses œuvres les plus intrigantes et les plus secrètes.
Incompris à l’époque, ce film est l’une des plus belles histoires d’amour jamais contée par Truffaut. Magistralement interprété par Jean-Paul Belmondo à contre-emploi, dans le rôle d’un homme secret, transi d’amour et par une Catherine Deneuve au sommet de sa beauté (ce sera d’ailleurs la seule fois que ces deux immenses acteurs français seront réunis à l’écran), La sirène du Mississipi est un étrange polar tiré d’un roman noir de William Irish, qui traite en fait principalement de l’amour fou que porte Louis Mahé (Belmondo) à Julie Roussel qui est en vérité Marion (Deneuve).
Truffaut ausculte les sentiments qui unissent les deux amants avec une remarquable finesse, sentiments qui souvent contradictoires. En effet, l’énigmatique Marion, la voleuse, la manipulatrice, la femme fatale, entraîne le pauvre Louis, qui souhaite au départ se venger de l’affront, dans une spirale infernale, où éperdu d’amour pour elle, il sera amené à commettre des actes irréparables.
Le lien qui unit Louis à Marion est presque sado-masochiste, tant Louis est devenu par amour le jouet de Marion. Mais plus elle le manipule, l’humilie, le trahit, plus il l’aime. Et cet amour fou finit par la toucher…
Dans cette atmosphère très hitchcockienne, Louis est une victime quasi-consentante qui est même prêt à mourir pour Marion. Dans une admirable scène finale, alors que Marion vient de tenter de l’empoisonner, le dialogue qui se développe entre Louis et Marion donne la conception de l’amour qu’a Truffaut, qu’il réutilisera d’ailleurs dans son surestimé (à mon sens) Le dernier métro. Louis déclare : « Ta beauté est une souffrance ». Marion lui répond : « Hier tu disais que c’était une joie ». Il lui rétorque alors : « C’est une joie ET une souffrance ». Ce dialogue-clé de l’œuvre de Truffaut sera repris mot pour mot dans Le dernier métro.
Au final, La sirène du Mississippi est une œuvre majeure du cinéaste français, injustement boudée lors de sa sortie en salle. Elle est empreinte d’une poésie très particulière qui peut laisser hermétique, mais reste une des plus belles histoires d’amour de l’histoire du cinéma.
10/10
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