Réalisé en 1968 par le grand cinéaste français François Truffaut, auteur des remarquables Les deux anglaises et le contient, Jules et Jim ou encore Vivement dimanche !, La sirène du Mississippi est une de ses œuvres les plus intrigantes et les plus secrètes.
Incompris à l’époque, ce film est l’une des plus belles histoires d’amour jamais contée par Truffaut. Magistralement interprété par Jean-Paul Belmondo à contre-emploi, dans le rôle d’un homme secret, transi d’amour et par une Catherine Deneuve au sommet de sa beauté (ce sera d’ailleurs la seule fois que ces deux immenses acteurs français seront réunis à l’écran), La sirène du Mississipi est un étrange polar tiré d’un roman noir de William Irish, qui traite en fait principalement de l’amour fou que porte Louis Mahé (Belmondo) à Julie Roussel qui est en vérité Marion (Deneuve).
Truffaut ausculte les sentiments qui unissent les deux amants avec une remarquable finesse, sentiments qui souvent contradictoires. En effet, l’énigmatique Marion, la voleuse, la manipulatrice, la femme fatale, entraîne le pauvre Louis, qui souhaite au départ se venger de l’affront, dans une spirale infernale, où éperdu d’amour pour elle, il sera amené à commettre des actes irréparables.
Le lien qui unit Louis à Marion est presque sado-masochiste, tant Louis est devenu par amour le jouet de Marion. Mais plus elle le manipule, l’humilie, le trahit, plus il l’aime. Et cet amour fou finit par la toucher…
Dans cette atmosphère très hitchcockienne, Louis est une victime quasi-consentante qui est même prêt à mourir pour Marion. Dans une admirable scène finale, alors que Marion vient de tenter de l’empoisonner, le dialogue qui se développe entre Louis et Marion donne la conception de l’amour qu’a Truffaut, qu’il réutilisera d’ailleurs dans son surestimé (à mon sens) Le dernier métro. Louis déclare : « Ta beauté est une souffrance ». Marion lui répond : « Hier tu disais que c’était une joie ». Il lui rétorque alors : « C’est une joie ET une souffrance ». Ce dialogue-clé de l’œuvre de Truffaut sera repris mot pour mot dans Le dernier métro.
Au final, La sirène du Mississippi est une œuvre majeure du cinéaste français, injustement boudée lors de sa sortie en salle. Elle est empreinte d’une poésie très particulière qui peut laisser hermétique, mais reste une des plus belles histoires d’amour de l’histoire du cinéma.
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