Célèbre pour être l’un des rares réalisateurs français à croire au cinéma fantastique, auquel il a donné plusieurs œuvres tout à fait insolites (La rose de fer, La vampire nue), Jean Rollin démarre sa carrière avec ce film, Le viol du vampire, qui apparaît sur les écrans français en 1968. Dans un superbe noir et blanc, Rollin introduit Le viol du vampire comme étant un mélodrame en deux parties. Dans sa première partie, Rollin nous met d'entrée dans une ambiance quasi irréelle où l'on voit des jeunes femmes tout de blanc vêtues dont on peut penser qu'il s'agit de vampires (peur de la lumière, visages blanchatres qui font penser qu'il s'agit de personnages d'outre tombe, les processions qu'elles effectuent). Mais rien n'est moins sûr, en tout cas au début du film. D'ailleurs, le doute est entretenu par le réalisateur. Mais évidemment comme on a toujours peur de ce que l'on ne connaît pas, ces femmes sont victimes des villageois avoisinnant. La seconde partie du film adopte un ton plus classique au niveau du film d'épouvante, le doute n'étant cette fois-ci plus permis. L'originalité du métrage, introduite par Rollin est de mettre en scène avant tout des femmes vampires. Rollin se réapproprie le mythe des vampires en le montrant à sa façon, en montrant d'ailleurs plusieurs fois le corps dénudé de ses actrices. Mais cela ne nuit nullement à la cohérence du film et à son intérêt.
Rollin nous amène dans ces lieux ordinaires qu’il affectionne (comme on pourra le voir dans ses films suivants), comme le château, la plage (qui introduit la seconde partie du film), ou le cimetière (qui constitue d'ailleurs un lieu romantique aux yeux du réalisateur) qu’il transforme par sa mise en scène en espaces extraordinaires, où tout est possible. Le viol du vampire peut déstabiliser le spectateur lambda, comme tous les autres films de Rollin, par son rythme lancinant et sa narration erratique qui donnent au métrage l’aspect d’un rêve (ou cauchemar) éveillé. C’est un film qui se base avant tout sur son ambiance, sur le ressenti et on peut trouver cela tout à fait ridicule et inintéressant. Mais si on se laisse porter par la beauté surréelle des images alors le spectacle devient envoûtant, insolite, presque hypnotique. Le viol du vampire constitue le premier film d'un réalisateur dont l'oeuvre est certes inégale mais passionnante.
|