Réalisé en 1962 par le grand cinéaste italien Michelangelo Antonioni, auteur des remarquables Blow up et Profession reporter, L’éclipse est le dernier volet d’une trilogie que le cinéaste a consacré à l’incommunicabilité, la vie moderne et la solitude des êtres, après les magnifiques L’avventura et La nuit.
Magistralement interprété par Monica Vitti et par Alain Delon, L’éclipse est une intense expérience cinématographique.
Doté d’une trame très ténue, qui se focalise sur le mal de vivre d’une jeune traductrice, Vittoria, qui se lie avec un jeune courtier en bourse (Delon), L’éclipse distille une atmosphère très particulière, montrant l’inhumanité du monde contemporain, qu’on peut notamment déceler dans la formidable scène de la foule à la Bourse de Rome, où le cinéaste a recours à une utilisation magistrale de la profondeur de champ.
Chez Antonioni, le monde contemporain se meurt, les êtres répètent mécaniquement les gestes quotidiens comme des automates, même l’histoire d’amour entre Monica Viti et Delon n’est plus qu’un motif parmi tant d’autres, se fondant dans une évocation hallucinante du mal de vivre.
Véritable poème cinématographique en noir et blanc, L’éclipse se clôt sur une scène finale d’une fascinante modernité, où le cinéaste filme des plans d’une ville qui se vide progressivement de toute substance, exprimant ainsi sa vision du monde. Par ailleurs, dans cette éblouissante séquence, ni Vitti ni Delon n’apparaissent. Par un incroyable montage et la puissance de ses plans, cette scène est l’une des plus définitives de l’histoire du cinéma, laissant le spectateur ahuri et pantois devant ce monument de pessimisme. Assurément L’éclipse est un des plus grands films d’Antonioni, qui abordera ensuite la couleur dans son film suivant, le génial Le désert rouge.
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