Réalisé en 1960 par l’immense cinéaste italien Michelangelo Antonioni, auteur des chefs d’œuvre que sont Le désert rouge ou Profession reporter, L’avventura est une révolution cinématographique.
Premier volet d’une trilogie sur le monde moderne, la solitude et l’incommunicabilité, qui sera suivi par les remarquables La nuit et L’éclipse, L’avventura dénonce une société moderne déshumanisée, complètement léthargique et repliée sur elle-même dans un récit à la trame incertaine où les personnages errent comme des fantômes, hagards.
L’incroyable innovation d’Antonioni dans ce film est d’avoir suivi un personnage futile, un peu vain, prénommé Anna (Léa Massari), le désignant comme personnage principal, puis de l’avoir fait totalement disparaître du cadre et du film au bout de 26 minutes (le film dure tout de même 2h25), le spectateur n’ayant aucune explication sur sa soudaine disparition (Antonioni n’expliquera jamais ce qui est arrivé à Anna). Le spectateur suit alors ensuite les aventures de Claudia (Monica Vitti), amie d’Anna, qui part à sa recherche mais qui semble ne pas vouloir la retrouver, plus préoccupée par son atraction envers Sandro (Gabriele Ferzetti), amant d’Anna.
Par le biais d’une mise en scène épurée, Antonioni crée des images nouvelles à la dramaturgie complexe, où le plan exprime le vide des âmes des personnages, qui entraîne progressivement un malaise intolérable. Dans d’immenses décors évidées de toute substance, les personnages d’Antonioni errent, se cherchant une âme dans un monde moderne mécanique.
Les images d’Antonioni sont uniques, d’une incroyable précision. Elles traquent le néant de l’existence d’êtres insignifiants, figées dans l’immensité du monde.
L’avventura brise toutes les règles de la dramaturgie classique et provoque un malaise intense. C’est un chef d’œuvre absolu du cinéma moderne, qu’il faut absolument avoir vu. Antonioni en creusera encore les motifs dans ses deux films suivants, La nuit et L’éclipse, dressant le portrait saisissant d’une société oisive et déshumanisée.
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