Réalisé en 1948 par le grand scénariste Abraham Polonsky, qui a été inscrit sur la la liste noire du maccarthysme, auteur de l’étonnant western Willie Boy avec Robert Redford, Force of evil est aussi connu sous son titre français : L’enfer de la corruption.
Film noir intense et d’un incroyable pessimisme, Force of evil frappe encore aujourd’hui par sa description réaliste du milieu de la pègre. Formidablement interprété par le regretté John Garfield, lui aussi victime du maccarthysme dans le rôle de Joe Morse, avocat véreux défenseur des intérêts le pègre, Force of evil dépeint une société corrompue de toute part qui finit par contaminer tout le monde.
Filmé dans un superbe noir et blanc expressionniste, Force of evil est un poème fulgurant dénonçant avec une rage peu commune la violence d’un système qui ne fait qu’écraser les personnes ou qui les corrompt.
En plus d’être une féroce critique sociale, le film de Polonsky s’intéresse aussi beaucoup aux conflits moraux qui assaillent Joe et n’oublie jamais le facteur humain, que cela soit dans l’histoire d’amour touchante entre Joe et la jeune femme interprétée par Beatrice Pearson ou dans le récit de la trahison de Joe envers son frère.
Marqué par une fatalité inéluctable, Force of evil est magistralement mis en scène par Polonsky, qui stylise le film à l’extrême, utilisant efficacement le son et l’image et créant ainsi une atmosphère troublante qui dépasse les poncifs du film noir.
Seul peut-être le fascinant La ballade sauvage, réalisé en 1974 par l’immense Terrence Malick, peut être comparé à ce film magnifique, de par sa puissance poétique et sa narration peu conventionelle.
Au final, Force of evil est un fleuron du film noir américain des années 1940 que tout cinéphile se doit d’avoir vu, faisant regretter que Polonsky n’ait pas eu la chance de tourner plus de films.
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