Réalisé en 1965 par le grand cinéaste japonais Tomu Uchida, spécialiste de chambaras, Le détroit de la faim est un film impressionnant.
Quittant l’univers des films de sabre pour un sujet débutant après la fin de la deuxième guerre mondiale et se clôturant à l’époque contemporaine de l’année de réalisation du film, Uchida livre un remarquable film noir, hanté par la fatalité. D’une durée de près de trois heures, Le détroit de la faim marque par sa description documentaire des conditions de vie misérables des japonais après la guerre. Filmé dans un superbe noir et blanc, Le détroit de la faim va s’intéresser aux actions de trois personnages pris dans une spirale infernale : un malfrat meurtrier, un flic obsédé par l’idée de retrouver le malfrat et une jeune geisha amoureuse du malfrat.
Les destins de ces trois magnifiques personnages, qu’Uchida décrit avec une rare finesse, sans jamais tomber dans la caricature (il n’y a ni bons ni mauvais dans le film, seulement des gens), vont s’entremêler dans une sarabande funeste qui ne pourra mener qu’à la tragédie, dressant un portrait extrêmement pessimiste du Japon ravagé de l’après-guerre.
Maintenant un suspense constant, aussi bien purement policier qu’émotionnel, Uchida livre un admirable film humaniste qui ne compte que des victimes. Superbement mis en scène et interprété, Le détroit de la faim présente des personnages complètement écrasés par leur destin, tout en contant une magnifique histoire d’amour entre la jeune geisha et le malfrat. La scène où le malfrat passe aux aveux est un modèle de mise en scène pure, Uchida conservant toute l’ambiguïté du déroulement des événements et laissant le spectateur croire ce qu’il veut.
Le détroit de la faim est assurément un des joyaux du cinéma japonais des années 1960. A découvrir d’urgence pour les amateurs du cinéma japonais et les amateurs de cinéma tout court.
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