Film atypique, ce "Jericho mansions" prime, au-delà de sa volonté esthétique évidente, par son histoire intrigante et par sa galerie de personnages délicieusement dépeinte.
Le script nous présente Leonard, le concierge, agoraphobe, amnésique et à la santé mentale certainement vacillante, d'un petit immeuble où il se passe de drôles de choses, jusqu'à la découverte d'un cadavre dans le vide-ordure qui va de fil en aiguille mettre à jour le passé de notre homme.
D'entrée, le réalisateur cherche à nous prouver sa maîtrise technique et son souci de donner à son métrage un aspect visuel et esthétique fort, avec cette présentation des personnages au travers d'une caméra passant à travers les murs et les conduits divers ( merci "Panic room" ) pour se livrer en notre présence à un tour d'horizon des locataires en nous donnant l'avis du personnage principal, le concierge que l'auteur s'efforce avec réussite de nous le rendre attachant, dans son triste quotidien coincé entre une propriétaire acariâtre et des habitants hystériques ou à côté de la plaque.
Et c'est en maniant un humour probant que le métrage va parvenir à immiscer le spectateur dans l'univers reclus de cet immeuble, en multipliant les situations confrontant les personnages, jusqu'à ce que l'intrigue démarre réellement avec le meurtre débouchant sur une enquête policière alambiquée, mais surtout amenant le personnage principal à s'interroger sur son passé jusqu'à la découverte d'une vérité plus que cynique et imprévisible dans son originalité.
Et c'est en se focalisant sur le quotidien misérable de ce concierge que l'auteur va disséminer chacun des éléments de ce puzzle ingénieux, dont le moindre détail aura au final son importance, même si l'ensemble pourra avoir un aspect quelque peu décousu ( les flashbacks récurrents avec les cowboys et l'homme ensanglanté, dont la présence aura de quoi intriguer, sans que l'on comprenne vraiment au départ leur intérêt ), surtout vu que la frontière entre la réalité et le délire onirique sera souvent très mince, ramenant ainsi la partie policière au second plan, puisque la quête de l'identité du meurtrier sera bien ardue, à la vue de la présence des nombreuses pistes exploitables.
Mais par-delà son intrigue passionnante malgré un rythme assez lent, le métrage vaut aussi par les qualités techniques ici mises en oeuvre. Déjà, les décors sont soignés dans une recherche de crédibilité fouillée, largement mis en valeur par une photographie mettant en avant des couleurs vives contrastant complètement avec d'autres plans beaucoup plus glauques, et la mise en scène du réalisateur est innovante, avec des plans aux angles de prise de vue spéciaux dans un souci d'originalité collant parfaitement avec la dimension onirique d'une partie de l'intrigue. De plus la caméra est sans cesse en mouvement pour venir cueillir les personnages et fouiller le moindre recoin des pièces de ce huit-clos, tout en alignant des effets hélas parfois limites ( l'usage du numérique est notamment bien visible dans certains plans ).
L'interprétation est contrastée, la faiblesse de certains interprètes étant entièrement compensée par la justesse du jeu de James Caan, touchant dans un rôle triste et misérable.
Donc, ce "Jericho mansions", malgré ses petits défauts, aura de quoi séduire par son univers plein de sous-entendus et sa capacité à impliquer le spectateur !
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