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Résumé "La 317ème section" : En mai 1954 en Indochine, peu de temps avant la défaite de Dien Bien Phu, l'histoire d'une fuite de huit jours d'une cinquantaine d'hommes à travers la jungle indochinoise.
Avis : Ancien collaborateur au service cinématographique des Armées, Pierre Schoendoerffer decide en 1965 d'adapter au cinéma son roman qu'il avait écrit deux ans auparavant. Il faut dire que le réalisateur, un peu à la manière d'Oliver Stone, savait de quoi il parlait : volontaire et parachuté à Dien Bien Phu, il y sera fait prisonnier.
Pour ceux qui seraient fâchés avec l'Histoire, rappelons juste que ce que nous Français appelons la guerre d'Indochine, deviendra quelques années plus tard la guerre du Viet-Nam. Entre temps, il y aura eu un changement d'armée "d'occupation", les français cédant le pas aux Américains. Il s'agit donc de la partie "française" de ce conflit qui nous intéresse ici. L'incroyable force de ce film est avant tout son authenticité : le film est tourné presque à la façon d'un documentaire, un peu comme si le caméraman se trouvait au milieu des soldats. Néanmoins, il y a bien un jeu d'acteurs et un scénario. En effet, ce dernier met en place 2 personnages qu'à priori tout sépare : un jeune officier fougueux (Jacques Perrin dans le rôle du sous-lieutenant Torrens) qui découvre l'Indochine depuis 15 jours et un sous-officier (Bruno Cremer dans le rôle de l'adjudant Willsdorf) résigné et rompu à tous les combats qui en est déjà à sa huitième année de "merdier indochinois". Deux conceptions de la vie, deux conceptions de l'art de la guerre s'opposent, mais plus que celà, au fur et à mesure du film, deux personnalités se respectent l'une et l'autre. Par ailleurs, malgré la progression psychologique de ces deux personnages du film, Schoendoerffer n'en oublie pas moins son cinéma vérité : sa mise en scène est très sobre et ne tourne jamais au spectacle "grand-guignolesque" que l'on a pu retrouver dans d'autres films sur ce conflit (je pense notamment à tous les films américains sur la guerre du Viet-Nam) : la mort est un élément du décor, qui frappe de façon très dépersonnalisée (à aucun moment on ne voit véritablement le visage de l'ennemi) et le réalisateur l'intègre habilement à son scénario au même titre qu'un autre personnage.
Pour finir, il faut faire l'éloge du remarquable travail du directeur photo Raoul Coutard (qui travailla également avec Godard) : le noir et blanc du film transpire "bon" l'angoisse et la mort qui rôde autour de cette 317ème section. Quelques mots également sur les acteurs principaux : Bruno Cremer et Jacques Perrin sont exemplaires de sobriété et de sincérité. Ils jouent sans faux-semblants, à l'image des héros qu'ils incarnent.
Un an après avoir achevé LA 317ème SECTION (tourné au Cambodge), Pierre Schoendoerffer repartira pour ce qui s'appelle désormais le Vietnam. Il y tournera un documentaire sur la guerre des GI's, "La Section Anderson", qui lui vaudra d'être récompensé par un Oscar.
Résumé "L'honneur d'un Capitaine" : A l'occasion d'un débat télévisé sur la guerre d'Algérie, un Professeur d'Histoire accuse un ancien Capitaine de l'Armée Française de s'être livré à des actes de torture. A cette occasion sa veuve tentera par le biais d'un procès de rétablir l'honneur de son mari.
Avis : Délaissant le cinéma-description, Schoendoerffer aborde dans ce film le cinéma du souvenir. En effet, l'intrigue du film qui démarre sur l'affrontement de deux thèses au sein d'un débat télévisé nous laisse présager du futur scénario : la veuve du capitaine deshonoré intente un procès au Professeur ayant mis en cause l'intégrité de son mari ; la suite du film se déroulera dans un prétoire où les deux théories s'affronteront (permettant ainsi de nombreux flashbacks) à travers les différents témoins appelés à la barre. On peut regretter ce parti pris du réalisateur et ce pour deux raisons principalement : d'une part parce que le procédé ralentit nettement le propos du film (on est bien loin de la tension palpable et suintante des images de la 317ème section) et d'autre part parce que Schoendoerffer ne nous propose plus un film sur la guerre d'Algérie, (où le conflit intérieur algérien selon les points de vue), mais véritablement un film sur l'Armée. Et c'est là que le film dérape : car pour nous parler de l'Armée, le réalisateur tente de nous faire part de son point de vue quant à la torture pendant ce conflit. Malheureusement, le traitement qu'il en donne n'est pas suffisamment fouillé (le scénario part de la disparition d'un barbier arabe) donnant à ce thème un traitement presque anecdotique. C'est fort dommage car un sujet aussi douloureux et vif pour l'Histoire en général aurait mérité un meilleur traitement que celui qui le cantonne à un échange de diatribes entre deux avocats dans une salle de justice. Décevant !
Résumé "Le Crabe Tambour" : Le lieutenant Willsdorf, surnommé le Crabe-Tambour, est une légende, un mythe, survivant des combats d'Indochine et d'Algérie. Des années plus tard, à bord d'un escorteur en direction de Terre-Neuve, deux hommes se souviennent de cet officier...
Avis : Inspiré de la vie du Lieutenant de Vaisseau Pierre Guillaume, le Crabe Tambour est, au même titre que l'Honneur d'un Capitaine réalisé 5 ans plus tard, un film sur l'Armée et non un film sur la"Guerre". Quoique... En effet, le film aborde un thème intéressant, conséquence directe de la Guerre, à savoir le devenir de tous ces hommes, ces combattants, qui longtemps éloignés de France, éprouvèrent les plus grandes difficultés à retourner vers la vieille Europe, retour coïncidant avec la fin de l'Empire Colonial Français. Malgré ce postulat intéressant, ce film est d'une lenteur extrême accentuée par le jeu volontairement lent des acteurs. De plus les flashbacks incessants cassent le rythme du film et ajoutent à la confusion du spectateur : on a ainsi véritablement du mal à comprendre où veut en venir Schoendoerffer. Toutefois, le film possède également quelques qualités indéniables (la sublime photo de Raoul Coutard, l'excellente interprétation de Jean Rochefort) mais on regrette que l'aspect "mythique" de cet officier ne soit pas plus approfondi, aloudi qu'il est par certaines considérations religieuses en décalage avec le propos du film.
Le film, qui remporta 3 Césars à sa sortie, fut tourné sur un authentique escorteur d'escadre de la Marine Nationale, le Jauréguiberry qui fut désarmé après le tournage du film en 1977 puis coulé en 1986.