DVD A LA LOUPE

Résumé : Une famille part en vacances sur les routes de Californie. Aux abords d'une ancienne zone militaire perdue en plein désert, une route isolée les conduit vers le pire des cauchemars...

Avis : En 2003 sortait sur les écrans un petit film français qui allait beaucoup faire parler de lui, ce film s’appelait haute tension. Film d’horreur viscéral mettant en scène une Cécile de France habitée par son rôle et un Philippe Nahon une fois de plus impressionnant. Le film n’a pas trouvé son public en salles, en particulier en France alors qu’il a très bien marché ailleurs dans le monde, la faute à un final en total décalage avec le reste du film que beaucoup n’ont pas aimé (et surtout pas compris en voulant appliquer des lois cartésiennes…). Si ce film n’est pas un chef d’œuvre, il a le mérite d’avoir un peu dynamiter le cinéma de genre français et s’avère très sympathique, même si le 2ème visionnage perd de l’intérêt. Mais au moins ce film a permis de faire connaître son réalisateur talentueux, Alexandre Aja, fils d’Alexandre Arcady. Un réalisateur qui aime le cinéma d’horreur, qui en a assimilé les ficelles et qu’on ne peut donc qu’aimer.
En 2006 il s’attaque à un projet d’une toute autre envergure, le remake de la colline a des yeux, film que je n’ai pas vu mais culte pour beaucoup de monde, remake produit par le réalisateur de l’original, Wes Craven le papa de Freddy. Et là forcément, grosse excitation pour le fan d’horreur de base, les premières images dans Mad Movies, les premières previews, la première bande annonce… Tout cela annonce un film de malade, sauvage et définitif, ce qui rend l’attente d’autant plus insupportable. Alors promesse tenue ??
… Allez, oui à 95%

Tout d’abord ce qu’il faut savoir c’est que la colline a des yeux s’inscrit dans un genre bien précis, à savoir le survival, genre très fréquenté dans les années 70 et dont les meilleurs représentants sont massacre à la tronçonneuse et délivrance, 2 purs chefs d’œuvre inégalables et intemporels que tout le monde doit avoir vu au moins une fois. Depuis peu, sous l’influence de jeunes réalisateurs amoureux du genre, on voit réapparaître le survival au cinéma, et c’est même devenue une mode. Heureusement pour nous c’est souvent du cinéma de qualité car à côté des sympathiques monster man, détour mortel et jeepers creepers on a eu droit à 2 bombes, the descent et wolf creek. Aja a vu the descent avant de se lancer dans l’aventure de la colline a des yeux et il a très vite compris qu’il serait difficile de faire mieux, il a donc décidé de faire autrement, cette décision toute à son honneur va néanmoins donner le défaut majeur du film : ça ne fait pas peur ! Tout du moins il n’est pas aussi terrifiant que le dit Mr Tarantino dont la phrase « La colline a des yeux est vraiment terrifiant… » est mise en avant sur la jaquette… On sursaute peut-être à une ou deux occasions mais on ne ressent pas cette peur qu’on peut par exemple ressentir devant Dark Water, pour ne citer que celui qui m’a réellement terrifié ces dernières années. Par contre Aja réussit à créer une ambiance malsaine et oppressante, donc on n’a pas peur mais on ne fait pas le malin quand même, on se sent même mal à l’aise et étouffé parfois. S’il fallait choisir un adjectif pour qualifier ce film, ça serait pour moi « efficace ». Je m’explique, la scène d’intro est un modèle (comme the descent) avec ces scientifiques au travail dont on sait qu’il va leur arriver un truc et on a d’un coup 30 secondes à une minute d’hystérie totale avant le générique… choc assuré, le spectateur ne peut pas lâcher l’écran ni son fauteuil. Ensuite arrive la séquence d’exposition avec mise en place du lieu et des personnages, dans le plus pur style du survival (lieu peu accueillant, station service paumée, pompiste étrange…) la présence de créatures étranges et à priori dangereuse se fait sentir chaque minute un peu plus, mais sans dévoiler leur physique, même parti pris que dans the descent ou plus loin dans les dents de la mer, predator, etc… Cette astuce de narration fait toujours son petit effet car on ne sait pas trop à quoi s’attendre et quand on découvre enfin les mutants, on a bien entendu une réaction de dégoût ! Aja connaît donc ses classiques, c’est indéniable, la preuve est qu’on vit vraiment très mal ce qui va arriver à cette famille, on éprouve vraiment de la sympathie pour cette famille, même si le père est un beauf fan d’armes à feu et la mère catholique impuissante et en admiration devant le grand Bob, Brenda l’ado rebelle qui préfèrerait être à Cancun (pauvre Emilie de Ravin, après l’île mystérieuse de Lost elle doit affronter le désert, comme on la comprend qu’elle aimerait être ailleurs :D), etc… des personnages qui ne seraient vraiment pas attachants mais ce qui va leur arriver est tellement extrême qu’on en vient à les aimer et à souffrir avec eux. Et c’est à ce moment, lorsque les mutants passent vraiment à l’action (après que l’accident de caravane nous ait fait lâcher un léger « oh putain ! ») que le film s’envole vers ce qu’on attendait tous… et la boucherie commence !
A partir de ce moment, Aja fait preuve d’une telle énergie dans ses cadrages que la tension qui se dégage de cette caravane en devient presque palpable. Immolation, viol, meurtres sauvages, etc… tel est le cocktail préféré des pauvres mutants. Faut les comprendre ils s’ennuient dans leurs montagne, alors quand il y a de la visite, c’est la fête ! Sérieusement cette partie du film est vraiment impressionnante de sauvagerie, les belles couleurs chaudes du désert (au passage la photographie de ce film est vraiment superbe) laissent place à une nuit crade et le sang coule vraiment à flots.

Passée cette longue séquence éprouvante de massacre, le film entre dans sa partie « revanche » et le personnage tout faible se transforme en vrai guerrier et va régler ses comptes avec les dégénérés dans un nouveau déchaînement de violence assez inouï mais pour lequel on se sent beaucoup moins impliqué. Et on touche là un autre problème du film, les mutants. Alors certes leur look est vraiment excellent, ils sont très effrayants mais tout d’abord il aurait été vraiment intéressant de connaître chacun d’eux plus en détails (il y avait vraiment matière, d’ailleurs il me semble que les scénaristes ont crée un background pour chaque mutant) et enfin, alors qu’ils sont montrés comme des victimes de la politique militaire américaine lors du générique d’intro, ils ne sont ensuite que des bêtes qui ne méritent qu’une chose, mourir. C’est ces 2 choses qui font qu’on ne ressent pas grand-chose envers ces mutants, ils ont ce qu’ils méritent, point barre… mais ça ne fonctionne pas très bien et c’est dommage.
Après il faut relativiser, ce sont des défauts qui peuvent être gênants, mais en fait ce film est tellement jusqu’auboutiste, tellement jouissif, tellement nihiliste qu’on prend un plaisir énorme, et je pèse mes mots.

Pour moi cette version 2006 de la colline a des yeux est donc globalement une réussite. Certes il y a des défauts mais il faut garder à l’esprit que ce n’est que le 3ème long métrage de son réalisateur. Il dégage une telle puissance, les cadres sont tellement précis et beaux qu’on prend son pied. Et puis c’était un film inespéré, mais grâce à lui, grâce aux autres survivals cités ci-dessus, grâce au fabuleux devil’s rejects… grâce à toutes ces petites bombes pas toutes parfaites mais toutes très couillues, le cinéma de genre est en train de se réveiller et nous livre de sacrés films. Vivement la suite !!!

 
La colline a des yeux (2006)